Tous les jeudis j’accueille en live des artistes, céramistes, toujours en lien avec la poterie. Le but est de vous faire découvrir leur parcours, leurs créations, leurs ambitions. Ces lives sont une source d’inspiration pour tous les amateurs d’argile que l’on soit apprentis céramistes ou céramistes confirmés. Voici l’interview de Charlotte Talbot alias « Super Ceramics » qui va nous parler d’elle, de ses techniques et de sa vie de céramiste.
J’ai découvert cette céramiste sur Instagram, et j’ai eu un véritable coup de cœur. Son univers coloré et très graphique apporte gaieté et design à nos intérieurs. Je vous souhaite une belle découverte !
Interview de Charlotte Talbot « Super Ceramics »
Quel est ton parcours ? A quel âge t’es-tu lancée dans la poterie ? Qu’est ce qui t’a donné l’envie de pratiquer la céramique ?
Je suis designer industriel de formation après deux bachelors en écoles de design : ESAD de Reims et ECAL à Lausanne en Suisse. J’ai ensuite fait des stages dans différents bureaux de design avant de devenir cheffe de projet dans le bureau du designer allemand Konstantin Grcic. C’est à Munich où je vivais que j’ai fait mon premier stage de céramique en 2016 lors de mon congé maternité. Ce fut le coup de foudre car j’ai adoré travailler avec mes mains et loin de l’écran. J’ai ensuite petit à petit transformé cet hobby en passion et travail à mi-temps puis j’ai ouvert mon compte Instagram.
Comment t’es-tu formée ? Autodidacte ? École de poterie ?
Je suis autodidacte et je me considère comme très naïve par rapport à la terre, les émaux et la cuisson. J’ai fait un stage d’une semaine à la Poterie de Lucante en Mai 2018 mais depuis je teste, essuie des échecs et apprend à chaque cuisson. Ma vie actuelle ne me permet pas de faire une formation longue de poterie mais j’espère pouvoir encore faire des stages de temps en temps pour approfondir ma pratique ou découvrir de nouvelles techniques.
Quelle terre utilises-tu ? Pourquoi ?
J’utilise du grès blanc, gris et noir pour le moment mais en changeant de pays et donc de fournisseur, je vais chercher de nouvelles terres. J’ai choisi le grès car je créé des objets du quotidien et que j’ai besoin que ceux-ci soient résistants et puissent passer au micro-onde, au lave-vaisselle pour un usage intensif.
Aujourd’hui tu utilises davantage la technique de la plaque. Pourquoi n’as-tu pas utilisé le coulage ou le tournage ?
J’ai un peu tout testé. J’ai acheté un tour car je voulais tester les séries. J’ai donc fais des stages de tournage et je n’ai pas réussi à connecter avec cette technique. J’ai été habitué dans le monde du design industriel à faire des maquettes à plat et donc en céramique, ça m’a paru assez évident de faire pareil. Ça m’est venu naturellement.
Je dessine d’abord mes pièces à la main, puis ensuite, je passe sur l’ordinateur. J’ai un logiciel de 3D qui s’appelle Rhinocéros sur lequel je fabrique mes patrons. A force d’avoir développé cette technique, je suis assez rapide et je me suis rendu compte qu’au tour ce n’était pas le cas.
Le coulage j’ai également testé, mais c’est comme tout, c’est un investissement ! Il faut pouvoir stocker les moules, la table pour faire les déversements, etc…
Dans tes collections tu déclines une même forme, cela ta aidé à trouver ton style ?
C’est exactement ça ! Au début, quand on découvre, il y a tellement de possibilités de formes, de techniques et d’émaux. Moi, je suis tout de suite partie sur l’utilitaire car je viens du monde du design industriel. Je suis d’abord parti sur les tasses, bols et assiettes, puis j’ai exploré. Je ne savais pas quel était mon style dans la céramique. J’ai trouvé mon style grâce à mes déclinaisons de collections. En faisant cela, je suis tombée sur les crayons à oxyde avec des motifs linéaire (des carreaux) et c’est aujourd’hui ce qui fait ma marque de fabrique.
En plus du crayon à oxyde, je suis partie sur du thermographe. J’ai des collections fonctionnelles comme avec le bol, la tasse, le pot à lait, puis quand j’ai trouvé la forme, j’explore les finitions et donc les techniques.
Toi qui as un univers très coloré, comment définis-tu tes couleurs ?
J’aime la couleur. Elle fait partie de ma vie quotidienne et naturellement, cela se retrouve dans mes pièces. Je les définirais comme vivantes et vibrantes. Sur ce sujet, je teste encore beaucoup et mon rêve serait de pouvoir créer mes propres émaux, mais j’en suis encore loin.
Tu as utilisé plusieurs modèles de ventes comme les ventes éphémères et aujourd’hui tu reviens sur un e-shop à l’année pourquoi ?
Les ventes éphémères c’est très pratique en termes de production à l’atelier. On peut tout fabriquer d’un coup et envoyer. Malheureusement, je ne vends pas tout ! Je pense que ça marche pour les céramistes qui écoulent tout leur stock durant la vente comme Justine « les petites porcelaines ». À la fin de certaines ventes, il me restait des pièces et comme je fermais mon e-shop, les pièces restaient sur une étagère à prendre la poussière.
Les ventes éphémères créées aussi de la frustration, il faut bien choisir sa date. Avoir un e-shop ouvert en permanence me permet d’être plus flexible sur la production surtout que j’ai une collection permanente. C’est aussi plus spontané car les gens viennent acheter pour faire des cadeaux ou pour les anniversaires. Ça m’a aussi permis d’étendre mon public, j’ai davantage de garçon et je me suis développée en Europe et à l’international. Mes gains ont augmenté grâce à ça.
Toi qui a une belle communauté sur Instagram, as-tu un conseil pour les céramistes voulant se rendre visibles sur cette plateforme ?
C’est très dur de se lancer puisqu’il y a tellement de comptes… Je dirais qu’il ne faut pas à tout prix vouloir un grand nombre de followers. Il faut simplement montrer honnêtement son travail et son univers. Publier fréquemment, interagir avec les gens et faire de belles photos si possible. J’ai remarqué que plus je partage avec des mots sous mes photos ou alors en stories ou avec des vidéos, plus les gens apprécient et suivent.
Vers quoi t’aimerais aller sur les réseaux sociaux ?
Je le répète mais c’est dur les réseaux sociaux ! Tiktok, j’ai voulu commencer mais c’est un réseau que je n’utilise pas donc j’oublie de poster. Instagram j’en ai besoin, j’ai également une newsletter mais le réseau le plus efficace c’est Instagram. Mais c’est dur de devoir dépendre d’un algorithme. Je pense qu’il faut réussir à rendre l’expérience pas trop stressante.
Pourquoi tu écrits en anglais sous tes post ?
Parce que j’ai commencé en Allemagne et c’était la langue de base que j’utilisais. Puis ma communauté n’était pas Française au départ. A un moment j’ai voulu écrire en deux langues mais ça serait trop compliqué de traduire tous mes textes. Après 30 à 40% de la clientèle qui achète mes tasses c’est du hors France. Je voie que petit à petit le marché Français deviens compliqué et je vend mieux à l’étranger.
Comment gères-tu tes semaines de céramiste ?
Déjà, je vis ou je travaille, c’est un énorme avantage ! Mon compagnon est aussi en freelance donc il est aussi à la maison avec des horaires très flexibles. On est sur un partage à 50/50 de tout. Je fais deux jours à 9h – 18h30 et deux jours où je finis à 16h30. Puis on se partage le mercredi avec les enfants. C’est des semaines qui sont très courtes, je suis entre 32 et 34 heures par semaine.
Après, je ne calcule pas par les heures après que les enfants soient couchés où j’écris quelques postes. Je n’aime pas aller travailler le soir dans l’atelier et le week-end non plus donc mes semaines doivent être très efficace. Je pense que ça aide beaucoup d’avoir des enfant parce qu’on est obligé d’être efficace, c’est comme ça ! Je me fais des listes de ce que j’ai à faire dans la journée. Le vendredi soir, je me pose et je fais une liste de ce que je vais faire la semaine d’après. Je me fais mon planning et je vais vraiment le suivre !
Les inspirations de Charlotte Talbot
Quel(le) céramiste te laisse bouche bée ?
Il y en a pleins car n’étant pas une professionnelle de ce milieu je suis réellement frappée par l’univers de certain.e.s. Je suis moins impressionnée par la technique que par leurs personnalités si distinctes. Je pense à Laura Philippon, Studio Oyama, Annette Lindenberg, Frizbee Ceramics ou encore Emmanuelle Roule.
As-tu des livres d’inspirations à nous proposer ?
Je viens du monde du design industriel donc je suis beaucoup inspiré par les objets du quotidien. Voici les livres qui m’ont le plus inspiré :
- Konstantin Grcic Pandrama
- « The hard life » de Jasper Morrison
- « Géométrie de la pasta » de Caz Hildebrand et Jacob Kennedy
- « Je dors, je travaille » de Valentine Schlegel
- « Hidden forms » de Franco Clivio
- « Usefulness in Small Things » de Kim Colin and Sam Hecht
Découvrez les créations de Charlotte sur son site : SUPER CERAMICS.
Merci à Charlotte « Super Ceramics » pour sa participation ! Je vous invite à écouter l’interview sur Instagram.
